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Dimanche
de la
Pentecôte ! (1)
Un
certain dimanche ancien, te rappelles-tu ce grand
bouquet de roses ?… Le matin, revue en tenue de campagne :
les
armes, les effets, l’équipement. Je constate avec
surprise
que le lieutenant Q… (2)
sait mon nom. … Mélancolie, à cause de cet admirable soleil, à cause de la séparation, à cause … (Le lieutenant sait mon nom, mais il ne sait pas mon caractère ; car me confondant avec M…, il me propose de faire la cuisine à la quatrième escouade !) L’Italie marche enfin avec nous : [passage censuré] (3) Promenade le soir dans Hersin-Coupigny, une petite heure. Les rues pleines de soldats, naturellement ; soldats bleus, et de zouaves, et de tirailleurs, Français, Algériens, Marocains (4), de femmes, de plusieurs de ce fameux type de flamand, aucune figure fine, de petits enfants, quelques-uns d’une charmante grâce. Le ciel plein d’aéroplanes, quatre, cinq à la fois, l’un d’entre eux canonné dans le beau crépuscule par de grosses bombes grises. Dans un affreux estaminet, où nous buvions une chope, tandis qu’un fripouillard piteux chantait une chanson de fiancée et de couronne dérangée, puis une chanson anticléricale d’un pédantisme et d’une grossièreté à faire pleurer, nous essayons de causer avec un Algérien attablé à sa bouteille de vin : il vient de Mélilla par Bône, et s’est engagé en décembre ; vraisemblablement pour la prime. Quelle pensée en cet Oriental ? Rien de visible. Mais je conclus que nous leur faisons beaucoup d’honneur en les admettant à se faire mitrailler pour nous. Hélas, cette guerre est abominable… |
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