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En 1965, le journaliste et écrivain René-Gustave Nobécourt signe un ouvrage retraçant le destin des soldats qui ont combattu sur le Chemin des dames. Livre incontournable, Les fantassins du Chemin des dames, est certainement pour l'année 17 l'un des documents les plus importants sur l'histoire du 28e Régiment d'infanterie : en effet, l'auteur était un bleuet de 1917, un aspirant de la 10e compagnie du 28e RI.
Son baptême du feu aura lieu sur la crète du Chemin des dames au nord de Vailly devant la ferme des Bovettes.

Photographie du chapitre VI de l'ouvrage "Les fantassins du chemin des dames" de R.-G. Nobécourt

Avec l'aimable autorisation de sa fille, voici les passages de l'ouvrage concernant les combats du 28e RI. L'auteur utilise deux pseudonymes (Philippe Védie et Bernard Lannier) pour coucher sur le papier son propre témoignage de combattant.



Chapitre VI, "Les bleuets de 17", "La ferme des Bovettes"
Pages 243 à 244

"Une nuit de juin, l’aspirant Védie, qui était l’un de ces garçons [les bleuets de 1917], traversait les ruines de Vailly. Comme des ombres accrochées, une vingtaine d’autres garçons le suivaient en colonne par un. Le sergent Perriot, qui marchait le dernier, était un vieux de la classe 14 auquel Verdun avait tout révélé – sauf que la mort l’attendait sur cette crête dont des fusées, par intermittences, jalonnaient et fixaient le mystère. De grands souffles passaient au-dessus de la petite troupe silencieuse, de grands aboiements, comme autour d’une proie fraîche. « Ça suit ? » demandait parfois l’aspirant en se tournant vers Gabriel Lévèque qui lui collait aux jambes. La question ricochait jusqu’à Perriot : « ça » suivait."


R.-G.Nobécourt à l'école militaire de Saint-Cyr
En janvier 1916, René-Gustave est un jeune séminariste de 19 ans.
Après son incorporation au dépôt d'Évreux, il rejoint l'école militaire de Saint-Cyr en septembre 1916.
Photo : collection Gouesse-Nobécourt.


L'encadrement de la 10e compagnie en avril 1917. JMO du 28e RI.
Le 16 mars 1917,  Nobécourt rejoint le front à Einville (près de Nancy)
pour servir à la 10e compagnie en tant qu'aspirant.
JMO du 28e RI.



"À 2 heures, la compagnie dormait au fond de la creute Prince Frederick Karl. Les Allemands s’y abritaient quand leurs premières lignes étaient à l’Aisne et que de Rouge-Maison, la ferme voisine, leurs canons battaient la rive sud de la rivière où ils nous avaient refoulés.  Sans doute la creute avait-elle reçu sa désignation, gravée dans le calcaire, lorsque le prince prussien tombé en mars à l’intérieur des lignes anglaises, au cours d’un combat aérien, était mort peu après dans un hôpital britannique de la banlieue rouennaise."

Les creutes de Rouge Maison, Vailly
Voici l'entrée de la creute dont parle Nobécourt.

"Philippe Védie errait en cette catacombe où chaque corps gisait près du bidon et près du pain. La bougie lui montrait tantôt un visage d’enfant aux paupières closes, qui souriait à des images lointaines, tantôt une face terreuse qu’un cauchemar crispait. Il déboucha du labyrinthe blafard sur un ciel plein d’étoiles. Un ravin glissait devant lui. Un sentier grimpait entre les arbres. D’en bas montait l’égouttement d’une source. O belle nuit ! O nuit enchantée ! La brume nonchalante du petit matin, alors que Philippe se disposait à rentrer dans la creute pour y sommeiller à son tour, fut secouée d’un hurlement énorme qui partait de l’autre côté du plateau et qui devint, la minute d’après, un roulement continu. L’aspirant Védie trembla. Puis les obus plongèrent dans le ravin, cherchant la fontaine, cherchant l’entrée de « Prince Frederick Karl ». Le fracas éclatait sur les pentes, y roulait en tonnerre. On entendait pourtant les arbres geindre au moment d’être brisés ; on entendait, un instant, l’eau jaillissante qui, note à note, continuait sa musique. Le grondement avait réveillé les hommes, ceux surtout, les Bleuets de 1917, qui n’en connaissaient pas encore de si profonds. Plusieurs qu’il oppressait, afin de retrouver l’air et le soleil, vinrent se blottir à l’entrée de la caverne. Le bombardement s’éclaircit, et, après quelques hoquets s’apaisa. Le printemps se réinstallait.
"

Extrait du JMO du 28e RI : le 6 juin 1917.
Le 6 juin 1917, les Allemands mènent une attaque
sur le secteur des Bovettes et du Panthéon tenu par le 119e Régiment d'infanterie.



"Alors, du boyau Colibri qui s’amorçait dans le talus, des blessés sortirent l’un après l’autre. On les interrogea avec une sorte d’avidité curieuse et frissonnante. L’ennemi venait de nous enlever la ferme des Bovettes : à cent mètres en deçà, nous tentions de regagner du terrain ; à chaque barricade de sacs hâtivement dressée, nous nous battions à la grenade. Ces blessés, la tête et les mains sanglantes, le regard chaviré, en apportaient la fièvre épouvantée. Philippe les regardait, les écoutait comme des revenants, comme des initiés à un mystère ténébreux que le mystère, au moment de les entraîner dans son vertige écarlate, dans son abîme, avait soudain rejetées vers des lumières plus humaines, qui les aveuglaient maintenant et auxquelles ils n’osaient plus croire. Il fallait les ramener à la vie par une parole amicale, par un mot drôle. Il en vint ainsi jusqu’à midi."

Lors de cette attaque, le 119e RI aura des pertes très importantes :
- Officiers : 2  blessés, 14 disparus,
- Troupe : 36 tués, 67 blessés et 595 disparus (tués ou faits prisonniers).
Source : JMO du 119e RI (Cote 26N683/2, SHD, Vincennes).

Localisation du boyau Colibri, JMO de la 88e brigade, SHD, Vincennes.
Voici la localisation des creutes de Rouge Maison et du boyau Colibri.
JMO de la 88e brigade, 8 juillet 1917, SHD, Vincennes.


1. Paul Cochereau,
né le 12 avril 1879
à Challes dans la Sarthe.

"À 2 heures le lieutenant Cochereau (1) avait informé les chefs de section de la 10e compagnie du 28e R.I. qu’ils auraient à reprendre les Bovettes à la tombée du jour. L’ordre était sommaire : la section de l’aspirant gagnerait la première ligne et sortirait de la tranchée face à la ferme pour l’atteindre d’un élan. A 17 heures, un par un, on s’engagea dans le boyau Colibri. Tout de suite on fut sur le plateau et la tempête de nouveau déferla en même temps qu’un orage : d’où venaient ces éclairs et quelle était cette foudre que le tumulte confondait ? Courbée, vacillante et muette, la section avançait à travers ce halètement, dans cet arrachement de tout où l’âme se sentait aspirée et s’apprêtait  à fuir les chairs défaites."

La ferme de Rouge Maison, Chemin des Dames
La ferme de Rouge Maison. Vue actuelle.
Photo : V. Le Calvez

"Le sergent Perriot suivait Philippe et quand celui-ci sortit son revolver : « Pas encore », lui dit-il seulement. On atteignit enfin la tranchée. Philippe Védie le sut d’abord parce que son pied s’enfonçait dans une matière molle où il devina le ventre d’un cadavre. Une senteur putride lui piqua les narines. Il en éprouva un écœurement singulier, un dégoût attirant, comme d’une fleur noire et malsaine, mêlant un parfum de géranium aux émanations d’un corps pourri. Que c’était étrange en ce moment et en ce lieu d’être ainsi « impressionné » par une odeur ! Elle serait vivace, et Philippe, la reconnaissant plus tard, décomposerait la substance de cette puanteur où l’humidité d’un sous-bois et les effluves poivrées d’un jardin s’alliaient à des relents gras de corruption et à d’aigres senteurs de poudre."


La ferme des Bovettes. Carte de Frédéréic Ponselle
Le secteur des Bovettes, lieu du baptême du feu du jeune Nobécourt.
Cette carte appartenait à Frédéric Ponselle, sous-lieutenant des pionniers du 28e RI.
Carte : Jacques Ponselle.

"Dans la tranchée submergée par l’ombre nocturne, on ne se voyait plus, on éprouvait, avec un même tremblement, une même certitude – celle qu’il faudrait à la prochaine minute sortir de ce trou où l’on se sentait encore protégé des balles qui ne cessaient de gicler à l’entour – et une même ignorance : lesquels étaient depuis toujours désignés pour mourir, à l’instant qui venait, devant la ferme des Bovettes, sur le Chemin des Dames ? On attendait, liés apparemment par le même sort et la même anxiété, et déjà, plusieurs, par une prémonition parfois lointaine, savaient que le moment où ils seraient déliés ne tarderait plus désormais, que la minute suprême était là, dont la clarté diffuse leur expliquerait soudain certaines inflexions de leur vie et justifierait plus complètement certaines hâtes qu’ils avaient eues, certaines assurances, tôt acquises, que leur avenir était dans le présent et que leur éternité serait celle d’un mort de vingt ans.
Le lieutenant Cochereau siffla et monta sur le parapet. Il en retomba, blessé aux jambes. Le sergent Perriot cria « En avant ! », sortit de la tranchée, puis s’écroula (2). L’aspirant Védie, couché sous les rafales qui jaillissaient des Bovettes, rampa quelques mètres, trois ou quatre hommes auprès de lui. Le soldat Albert-Bertrand Mistral (3) levant la tête cessa aussitôt de vivre. Où étaient les autres ? Quelle solitude tragique ! Les Allemands gardèrent la ferme des Bovettes."

La fiche "Mort pour la France" du sergent Georges Perriot.
2. La fiche "Mort pour la France" du sergent Georges Perriot.

Albert Bertand Mistral
3. Albert Bertrand-Mistral était le neveu par alliance du poète Frédéric Mistral.
Enterré devant la ferme des Bovettes par ses camarades, son corps ne fut jamais retrouvé.
En savoir plus ici.

 
 

Extrait de la lettre du chemin des dames n°7
Extrait de la Lettre du chemin des dames n°7 (juillet 2005) consacrée à l'auteur.
 


Chapitre VI, "Les bleuets de 17", "La tranchée de Franconie"
Page 270
Dans ce chapitre, l'auteur reprend les informations de l'historique du régiment et laisse la place au témoignage du lieutenant Varrier du 119e RI. Un seul paragraphe est consacré au 28e mais Nobécourt publie une carte avec la localisation des fameux tunnels allemands.

"Le 30 juin, vers 17 heures, un officier allemand interpellait à une barricade quelques grenadiers du 28e R.I. : «  Si vous voulez vous rendre, il est temps… Dans deux heures, il sera trop tard… » Ainsi prévenus, nous bombardions à 19 heures les positions ennemies du saillant de Deimling. Au même moment des stosstruppen, sans vareuse, les manches de la chemise retroussées, progressaient en chantant et en balançant leurs grenades le long des boyaux Nix, Kub et Toc. Nos mitrailleuses et nos V.B. ne les arrêtaient pas."

Carte des tunnels de la Bovelle, R.-G. Nobécourt, Les fantassins du Chemin des Dames
La carte des tunnels de la Bovelle, R.-G. Nobécourt, Les fantassins du Chemin des Dames.
Le tracé des tunnels a été colorisé en rouge.

"Il en arrivait aussi par trois grands tunnels dont les galeries, ouvertes en six endroits sur le versant de la cuvette de la Bovelle, aboutissaient à une dizaine de sorties dans nos lignes.  Nous étions envahis, tournés, submergés, et l’ennemi atteignait rapidement la tranchée de Franconie, réalisant ainsi d’un coup une pénétration de 400 mètres. Il tente de l’élargir vers la tranchée de la Fourragère. Notre résistance aux barricades de Franconie l’en empêchera mais il repoussera toutes nos contre-attaques sur l’élément de Franconie qu’il occupe. Nous ne saurions nous « résigner » à lui laisser la disposition d’une telle place d’armes souterraine d’où il peut surgir à tout moment pour étrangler le saillant de Deimling ou nous rejeter dans le ravin de Troyon."



  

Chapitre VI, "Les bleuets de 17", "La tranchée de Franconie"
Pages 274-176
Ce passage est probablement le plus important et le plus intime pour Nobécourt car il relate les conditions où il a reçu sa première blessure lors de l'attaque allemande du saillant de Deimling. Le 31 juillet 1917, 28e RI perdra pratiquement un bataillon.
Dans cet extrait, l'auteur utilise un second pseudonyme : l'aspirant Bernard Lannier, et cite deux noms de soldats : Ernest Bouvier et Paul Mauguy que nous n'avons pas retrouvés dans le JMO du 28e.

"Le 31 juillet, vers 12h30, l’aspirant Bernard Lannier arpentait cette tranchée de Berne d’où l’avant-veille, à l’aube, le lieutenant Varrier était parti à l’assaut de la tranchée de Franconie [officier du 119e]. La tranchée de Berne longeait exactement le Chemin des Dames. Elle le coupait même quand, au boyau d’Avesnes, elle joignait la tranchée Chansac : on voyait dans les parois les couches de ses empierrements. Le boyau d’Avesnes continuait d’une cinquantaine de mètres au-delà de la tranchée de Berne, vers la tranchée de Franconie. Il s’interrompait sur quelques vagues éléments d’une tranchée vacante par une barricade dont la section de l’aspirant Lannier fournissait les guetteurs depuis la veille.

Carte du secteur tenu par le 28e le 31 juillet 1917. Chemin des Dames. Carte : V. Le Calvez
Extrait d'une carte du secteur du saillant de Deiming.
Nobécourt appartient au 3e bataillon qui est en deuxième ligne, derrière le 1er bataillon.

Carte du secteur tenu par le 28e le 31 juillet 1917. Chemin des Dames. Carte : V. Le Calvez
Localisation du carrefour des tranchées Chansac-Berne-Avesnes.

L’abri de ses hommes, qui était le sien, se trouvait à proximité du carrefour Berne-Chansac-Avesnes. Ce carrefour, la nuit précédente et en ce matin du 31 juillet, était l’endroit où il stationnait entre ses allées et venues vers les guetteurs de la barricade et vers les emplacements de fusils-mitrailleurs qui battaient le plateau, en direction de Franconie. La matinée était si belle et l’air si tranquille qu’il n’imaginait pas que, déjà, un rendez-vous lui était donné là précisément. Avec le soldat Pierre Mauguy, un bleuet de 17 comme lui, qui supposait que « le tampon de l’aspirant » était un privilégié, il venait de partager un saucisson, une boîte de singe et un morceau de camembert ; il profitait du soleil et du calme.

Au même moment le soldat Ernest Bouvier nouait une conversation avec les Allemands à une barricade du boyau de Béthune, entre la tranchée de Deimling, à la pointe du saillant, et celle du zouave Sénéchal, que nous avions perdue le 30 juin.
« On n’était qu’à 6 mètres des boches. On a fini par se faire voir les uns les autres, puis on a causé. On se montrait nos bidons et on avait envie d’aller trinquer avec. Ils nous ont dit : Nous ne vous ferons pas de mal mais ne lancez pas de grenades. Nous vous attaquerons en force dans une heure. »

Photo du Poteau d'Ailles. Photo : V. Le Calvez, février 2006.
Le Chemin des Dames à la hauteur du Poteau d'Ailles et du saillant de Deimling.
Photo : V. Le Calvez, février 2006.
 



Pages 274-275

"À 13 heures en effet, une tornade soudaine se déchaînait. Elle s'abattait du saillant de Deimling au ravin de Troyon, y roulait quelques minutes puis encageait cette zone qu'occupaient à gauche le 344e R.I., à droite le 28e. Quelqu'un dans la tranchée Chansac, cria : " Les voilà !" En tenue très allégée, les stossstruppen arrivaient, par petites colonnes
courant chacun à son objectif. Déjà le P.C. du colonel du 28e R.I. avait capté un message du bataillon Dherse qui tenait le saillant : "Situation critique" puis, à 13h10, de nouveau un appel qui ne s'acheva pas. Pris à revers le bataillon était enveloppé, défait, éliminé, et le saillant n'existait plus : en un quart d'heure l'affaire avait été réglée. A droite les Allemands entouraient le P.C. du bataillon Duché, en tenaient les entrées, avec des lance-flammes et des pétards. Le caporal Thuau y lâche un pigeon : il reçoit un coup de feu et le pigeon est étranglé. Encerclée aussi, la compagnie Minart résiste. Par la tranchée Chansac l'ennemi s'insinue."

Extrait de l'historique du 28e RI : le pigeon du caporal Thuau
Extrait de l'historique du 28e RI : le pigeon du caporal Thuau.

Louis Thuau, caporal signaleur du 3e bataillon sera cité à l'ordre de la division (n°257 du 12 septembre 1917).

"A son carrefour l'aspirant Bernard Lannier dressait une barricade ; un éclair jaune frangé de rouge l'aveugle et il ressent à l'épaule un coup qui le stupéfie. Il pense : "C'est cela être blessé." Pierre Mauguy, près de lui, dans le même éblouissement, s'est effondré : "C'est cela mourir."

Liste des blessés de la 10e compagnie du 28e RI le 31 juillet 1917
Liste des blessés de la 10e compagnie du 28e RI le 31 juillet 1917 (JMO du 28e RI).
Le nom de Mauguy n'apparaît ni dans la liste des blessés, ni dans la liste des tués, ni dans le fichier des "Morts pour la France".

"Le sang coule le long du bras de Bernard – car voici l'aspirant Lannier redevenu l'enfant Bernard que l'aumônier de la 6e division, l'abbé
Fernand Carrel, recueille au détour du boyau d'Avesnes, tranquilise, oriente et auquel il donne du chocolat : "Je vais écrire à vos parents…" La vie a de ces moments singuliers, inhabituels, qui la changent d'un coup sans qu'on le sache aussitôt, sans qu'on aperçoive encore ce qu'ils viennent de révéler. Bernard Lannier saura-t-il jamais pourquoi c'est Pierre Mauguy qui était mort, à deux pas de lui ? Bien d'autres mouraient encore au Chemin des Dames pendant que, dans une creute de Paissy, le médecin nettoyait et bandait l'épaule de l'aspirant."

l'abbé de la 6e division d'infanterie : Fernand Carrel
l'abbé Carrel et R.-G. Nobécourt à Gournay-sur-Aronde en juillet 1918
En juillet 1918, l'abbé Carrel et le sous-lieutenant Nobécourt se retrouveront sur le front de l'Oise.
Photo inédite de la famille Nobécourt.
 


Pages 275 et 276
La fin du chapitre ne concerne plus le parcours de Nobécourt mais ce dernier cite le témoignage de soldats ayant survécu à cette attaque.

"Des contre-attaques dégageaient la compagnie Minart, délivraient le P.C. du bataillon Duché. Mais les Allemands avaient créé une poche et s'efforçaient de l'élargir. À la fin de la journée, parvenus à la tranchée Chansac et à la tranchée de la Fourragère, ils tenaient les observatoires au-dessus du ravin de Troyon où nous risquions de basculer. La lutte dura toute la nuit et tout le matin. Nous reprîmes un peu de champ à la tête du ravin mais l'ennemi gardait nos tranchées du saillant de Deimling et le tunnel du boyau de l'Yser où 600 prisonniers avaient été raflés.
Des tranchées de Bruckner et de Dresde il apercevait la vallée de Moulin vers Bourg-et-Commun, comme avant le 16 avril, et nous dûmes y camoufler les routes. "Nous sommes redescendus à 6 de ma section. Nous avons été entourés toute une nuit. Je n'avais plus rien sur le dos. C'est pire qu'à Verdun" – " Je sors de la fournaise. Je suis resté tout seul à une barricade. J'ai reçu sur la main une grenade qui n'a pas éclaté et deux balles de revolver dans mon casque. J'en reviens sans une égratinure." Le 28e R.I. avait perdu 850 hommes dont 23 officiers, et le 344e, 1020 dont 25 officiers (1)

Le Chemin des Dames, le saillant de Deimling
Voici une vue actuelle du saillant de Deimling.
Nobécourt reçut sa blessure à l'endroit du monument L. Astoul que l'on aperçoit sur la photo.
Photo : V. Le Calvez.

Note de R.-G. Nobécourt : 1. Cette attaque allemande menée par 3 régiments (les 13e, 15 et 55e) avait été "répétée" plusieurs fois sur un terrain au nord de Veslud, à 9 kilomètres du front, reproduisant les tranchées et boyaux du saillant de Deimling. Les unités d'assaut connaissaient le secteur. Elles en avaient été retirées le 21 juillet et n'y montèrent que dans la nuit du 30. Elles demeurèrent dans les abris jusqu'aux dernières minutes précédant l'attaque."
 
Remerciements
à madame Brigitte Gouesse, à son fils Martin, à Serge Hoyet et à Alain Orrière.
Cette page est dédiée à Jacques Nobécourt, décédé en 2011.

En savoir plus
- le JMO du 28e RI : 1er-15 juin 1917
- la mort d'Albert Bertrand Mistral, soldat de la 10e compagnie

  
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