Le 26 mai 1902, Paul Déchamps accède au grade de caporal. Comme beaucoup de Parisiens et de Normands, il effectue son service militaire à la caserne de la Pépinière à Paris dans les rangs du 28e d’Infanterie.
Treize ans plus tard, ce même 26 mai, il sera tué à Aix-Noulette en Artois.

Un modèle du genre
Paul Déchamps est un militaire de carrière qui va gravir régulièrement les échelons. En juillet 1912, il est sergent major et participe au fameux défilé du 14 juillet, où, privilège de son régiment, les compagnies portent de nouveaux uniformes dessinés par le peintre Édouard Detaille. Joëlle, la petite-nièce de Paul Déchamps nous dévoile une photo originale du sergent Déchamps, posant fièrement en tenue « Detaille ».

Les grades de Paul Déchamps
Les différents grades de Paul Déchamps.
En photo : la caserne de la Pépinière de Paris où Paul a fait sa carrière militaire.
Paul Déchamps du 28e RI

Paul Déchamps en tenue « Detaille », 1912.
Photo : Joëlle.

C'est le matin du 14 juillet 1912, allons à Longchamp et laissons le Parisien nous décrire ce défilé ! Attention, regardez bien les premières compagnies, il y a probablement Paul Déchamps dans les rangs...

« Les nouveaux uniformes
Les 6e, 7e et 10e Divisions d’infanterie défilent tour à tour dans un ordre parfait. Un vif moment de curiosité se produit lorsque le 28e régiment d’infanterie, qui a été choisi pour expérimenter les nouveaux uniformes.
Deux compagnies portent la tenue de campagne gris-bleuté. Dans cette tenue, le pantalon rouge est conservé. La veste est remplacée par une martingale dans le dos ; elle est munie de quatre poches, deux en haut, deux en bas. Les boutons, en os gris-noir, sont dissimulés. Le col est droit et porte des écussons rouges.
La capote, en même drap, affecte les formes que l’ancienne, mais elle a un col rabattu et quatre poches. Les hommes sont coiffés d’un képi rouge et bleu, dont la partie supérieure est constituée par une surface plane en cuir ciré, pour permettre l’écoulement de l’eau en cas de pluie.
Pour les officiers, la tunique est remplacée par une vareuse semblable à celle de la troupe, mais d’un drap plus fin. Ils sont coiffés d’un casque avec cimier.
Deux autres compagnies, également du 28e d’Infanterie passent, vêtues de la tenue gris vert de campagne, c’est-à-dire l’ancienne tenue réséda expérimentée aux manœuvres dernières et teinte en gris vert.

La caserne de la Pépinière, Paris

Photo de la Caserne de la Pépinière de Paris.
Troupes du 28e RI ayant participé au défilé du 14 juillet.
Cliquez ici pour voir les différents uniformes.

Enfin, une compagnie, toujours du 28e défile en grande tenue de service. Les hommes ont le pantalon rouge avec bandes molletières. La tunique est de l’ancien modèle mais transformée de la façon suivante : col entièrement rouge, parements rouges, lisérés rouges sur le devant, aux pattes de ceinturon et derrière au-dessus des boutons.
Ils sont coiffés d’un casque surmonté d’un cimier. Les officiers portent la tunique transformée d’après les mêmes principes, mais ils ne portent pas de galons. Ils ont une ceinture bleu de roi nouée sur le côté gauche, qui se termine par des glands d’or.
Le grade de l’officier se reconnaît à l’épaulette et son casque est du même modèle que celui de la troupe. Les tambours et les clairons, en grande tenue, ont sur la poitrine et sur les bras des galons. Ceux des bras et des manches sont en forme de V renversé et ceux de la poitrine ont la place des anciens brandebourgs des dolmans d’officiers.
Les Parisiens ont fait un chaleureux accueil aux uniformes dessinés par le maître Detaille, mais se sont montrés plus réservés pour le casque de grande tenue, qui ressemble un peu trop aux casques étrangers. »

Vitrine des Invalides

Aux Invalides, le musée de l’Armée propose une vitrine sur ces nouveaux uniformes.
Photo : V. Le Calvez

le défilé du 14 juillet 1912, Le Temps
Cet article est extrait du Temps du 15 juillet 1912.
Lisez la réaction du journaliste... Cliquez pour agrandir.

Le Figaro, 15 juillet 1912
Coupure de presse du Figaro, 15 juillet 1912


Extrait du programme du défilé.

1915 : de Berry-au-Bac à Aix-Noulette
À Berry-au-Bac, en mars 1915, Paul est devenu officier, il dirige une des sections de la 3e Compagnie, compagnie d’Adolphe Orange. En mai, le régiment arrive au pied de la colline de Notre-Dame-de-Lorette à Aix-Noulette (Artois) où l'offensive générale du 9 mai est dans l'impasse, les Allemands résistent. Dès la première journée de front, le 3e Bataillon est particulièrement meurtri. Il faut remplacer les officiers tués ou blessés. Paul Déchamps passe lieutenant, quitte la 3e Compagnie et va diriger la 12e Compagnie.
Le 26 mai 1915 est une terrible journée d’offensive générale. Après les échecs avortés du régiment, la 12e Compagnie tente une ultime attaque pour franchir la tranchée des saules et s'emparer du Bois carré. Déchamps, à la tête de ses hommes, est tué dans un élan presque suicidaire. L’historique du régiment relate ce fait :

Extrait de l'historique du 28e RI
Extrait de l'historique du 28e RI. Le nom de Paul Déchamps y est noté.

Le corps du lieutenant sera inhumé dans le cimetière franco-britannique d’Aix-Noulette. Voici une photographie de sa tombe, particulièrement bien entretenue par les services des sépultures du Commonwealth.

Sépulture de Paul Déchamps, enterré à Aix-Noulette (62)
Photo de la sépulture de Paul Déchamps, cimetière d'Aix-Noulette (Pas-de-Calais).
Photo : V. Le Calvez, octobre 2007.

Paul sera cité à l’ordre du 21e Corps d’armée (n°49, 18 juin 1915) : « Alors que les attaques des unités précédentes avaient été arrêtées par le feu de l’ennemi dès qu’elles débouchaient de nos tranchées, n’a pas hésité à franchir à son tour le parapet et est tombé mortellement blessé en avant de sa compagnie. »

Remerciements
Joëlle, Jérôme Charraud, Thierry Cornet, Bruno Nion, François Noury et Benoit Henriet.
Un très grand merci à Laurent Mirouze pour ses descriptions d'uniformes. On pourra ainsi se reporter à ses deux remarquables ouvrages :

Livre sur les uniformes de L. Mirouze

Laurent Mirouze, spécialiste des uniformes de la Première Guerre mondiale nous décrit avec précision Paul Déchamps :
la tenue est le projet d'Edouard Detaille présenté au défilé du 14 juillet 1912 par une compagnie du 28e de ligne. Les peintres Georges Scott et Edouard Detaille avaient été appelés par le général Dubail à la tête de la commission chargée des essais d'uniformes. Scott s'occupe de la cavalerie, Detaille de l'infanterie.

- L'homme est un sergent-major rengagé (2 galons obliques de 22 mm couleur or pour ce grade 1, la soutache or le long du parement de la manche indiquant un sous-officier rengagé 2).
- À ce grade, et le suivant qui est adjudant, on est considéré comme un sous-officier supérieur avec droit de porter le sabre, privilège des officiers
3. Ce sabre est le modèle 1845-1855.
- Le ceinturon à plaque est également réservé à ce grade, c'est la plaque modèle 1845 en cuivre doré ornée de la devise "Honneur et Patrie" qui encadre une silhouette féminine symbole du "Génie de la France"
4.

-La tenue se compose :
. casque "bourguignotte" en cuir noir à cimier et garnitures en laiton
5,
. vareuse en drap bleu cendré (nuance proche du futur bleu horizon)
6,
. pantalon garance
7,
. bandes molletières en drap bleu foncé du modèle des chasseurs alpins
8,
. ceinturon en cuir verni noir avec plaque modèle 1845
. sabre modèle 1845-1855
.

En savoir plus :
Page consacrée au 28e RI en mai 1915
Le JMO de mai 1915
Le cimetière franco-britannique d’Aix-Noulette

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